PROJECTIONS DE FILMS D'ARTISTES

The Voice
Trisha Baga

Cinémathèque Robert-Lynen, Paris
Mardi 16 mai 2017


Trisha Baga, The Voice, 2017. Vidéo, 24'. Courtesy de l'artiste & Vilma Gold (Londres)

The Voice, que Trisha Baga a présenté en début d'année à 356 Mission (Los Angeles) en version 3D, débute dans l'ambiance chargée de suspens et de faux effets cheap d'une improbable histoire de femme invisible. Initié par les quelques notes du générique immédiatement reconnaissable des productions Universal, le film se construit dans une succession de scènes hétéroclites, alliant photographies de unes de journaux (le triste rappel de la victoire de Donald Trump en novembre 2016), images tournées par l'artiste dans son studio, lors d'un voyage en famille aux Philippines ou de visites de shopping malls, à des extraits de films montrant des spectateurs munis de lunettes 3D, nouvel appendice de nos vies numériques, déroulant ainsi une vision haletante d'une réalité fragmentée. La bande-son, mix erratique de musique inquiétante de thriller, de pop musique et de pop asiatique ne fait qu'ajouter à la confusion.

Le « plot » alterne un récit rappelant vaguement la trame de La Petite Sirène — celle-là même qui, pour séduire un prince sauvé des eaux, donna sa voix en échange de jambes — et un exposé scientifique sur la mitosis, procédé explicité en biologie cellulaire par lequel une seule cellule se diviserait en deux et qui, s'il n'est pas corrigé à temps, rappelle la voix-off, pourrait conduire à des désordres génétiques ou à un illettrisme presque généralisé !

Dans la veine de ses oeuvres précédentes, Trisha Baga campe un délirium d'images et de sons, jonglant entre différentes atmosphères : thriller, film fantastique, documentaire scientifique, soudainement convertis en films de vacances dans des allers-retours anarchiques.

À l'écran flottent des petites sculptures ressemblant à des céramiques colorées qui ne sont que des chewing-gums déjà mâchés. La voix-off nous indique le début d'un test de Rorschach et la fameuse analyse des cartes commence, tout comme l'accélération du rythme, le taux d'oxygène devient critique, à l'image de notre propre perception, entre réalité physique et univers virtuel diffracté, hystérique.

Née en 1985 à Venice (États-Unis), Trisha Baga vit et travaille à New York. Elle a suivi des études à la Cooper Union School of Art et à Bard College. Récemment, elle a exposé à 356 Mission (Los Angeles), au Whitney Museum (New York) et à la Kunstverein de Munich. Elle a participé à la Biennale de l'Image en Mouvement (Genève) en 2016 et, en 2015, à des expositions de groupe au Folkwang Museum (Essen), à Kunst-Werke (Berlin) et au musée d'Art moderne de la Ville de Paris (Paris).